Pèlerinage des élus

mardi 24 octobre 2017


Pèlerinage des élus
à Sainte Anne d’Auray
Le dimanche 26 novembre 2017



Le pèlerinage des élus, organisé en partenariat avec le groupe Saint Thomas More, se déroulera le dimanche 26 novembre 2017 à Sainte-Anne d’Auray.

Le programme du pèlerinage comprend une Messe pontificale et une intervention de Madame Vera Baboun, femme politique palestinienne, première femme maire de Bethléem.

Programme
  • 8 h 45 : Accueil / café dans la Salle Kériolet (Sanctuaire de Sainte-Anne-d’Auray)
  • 9 h 15 : Intervention de Madame Vera Baboun, femme politique palestinienne, première femme maire de Bethléem. Cette Palestinienne chrétienne entend être facteur de changement dans le contexte enlisé du conflit israélo-palestinien.
  • 11h : Messe pontificale en la Basilique Sainte-Anne, suivie d’un verre de l’amitié.
    Saint Thomas More, patron des responsables de gouvernement et des hommes politiques
Lettre apostolique en forme de Motu Proprio pour la proclamation de Saint Thomas More comme patron des responsables de gouvernement et des hommes politiques

1. De la vie et du martyre de saint Thomas More se dégage un message qui traverse les siècles et qui parle aux hommes de tous temps de la dignité inaliénable de la conscience, dans laquelle, comme le rappelle le Concile Vatican II, réside « le centre le plus secret de l’homme et le sanctuaire où il est seul avec Dieu dont la voix se fait entendre dans ce lieu le plus intime » (Gaudium et Spes, n. 16). Quand l’homme et la femme écoutent le rappel de la vérité, la conscience oriente avec sûreté leurs actes vers le bien. C’est précisément pour son témoignage de la primauté de la vérité sur le pouvoir, rendu jusqu’à l’effusion du sang, que saint Thomas More est vénéré comme exemple permanent de cohérence morale. Même en dehors de l’Église, particulièrement parmi ceux qui sont appelés à guider les destinées des peuples, sa figure est reconnue comme source d’inspiration pour une politique qui se donne comme fin suprême le service de la personne humaine.

Certains Chefs d’État et de gouvernement, de nombreux responsables politiques, quelques Conférences épiscopales et des évêques individuellement m’ont récemment adressé des pétitions en faveur de la proclamation de saint Thomas More comme Patron des Responsables de gouvernement et des hommes politiques. Parmi les signataires de la demande, on trouve des personnalités de diverses provenances politiques, culturelles et religieuses, ce qui témoigne d’un intérêt à la fois vif et très répandu pour la pensée et le comportement de cet insigne homme de gouvernement.

2. Thomas More a connu une carrière politique extraordinaire dans son pays. Né à Londres en 1478 dans une famille respectable, il fut placé dès sa jeunesse au service de l’Archevêque de Cantorbéry, John Morton, Chancelier du Royaume. Il étudia ensuite le droit à Oxford et à Londres, élargissant ses centres d’intérêts à de vastes secteurs de la culture, de la théologie et de la littérature classique. Il apprit à fond le grec et il établit des rapports d’échanges et d’amitié avec d’importants protagonistes de la culture de la Renaissance, notamment Didier Érasme de Rotterdam.
Sa sensibilité religieuse le conduisit à rechercher la vie vertueuse à travers une pratique ascétique assidue : il cultiva l’amitié avec les Frères mineurs de la stricte observance du couvent de Greenwich, et pendant un certain temps il logea à la Chartreuse de Londres, deux des principaux centres de ferveur religieuse dans le Royaume. Se sentant appelé au mariage, à la vie familiale et à l’engagement laïc, il épousa en 1505 Jane Colt, dont il eut quatre enfants. Jane mourut en 1511 et Thomas épousa en secondes noces Alice Middleton, qui était veuve et avait une fille. Durant toute sa vie, il fut un mari et un père affectueux et fidèle, veillant avec soin à l’éducation religieuse, morale et intellectuelle de ses enfants. Dans sa maison, il accueillait ses gendres, ses belles-filles et ses petits-enfants, et sa porte était ouverte à beaucoup de jeunes amis à la recherche de la vérité ou de leur vocation. D’autre part, la vie familiale faisait une large place à la prière commune et à la lectio divina, comme aussi à de saines formes de récréation. Thomas participait chaque jour à la messe dans l’église paroissiale, mais les pénitences austères auxquelles il se livrait n’étaient connues que de ses proches les plus intimes.

3. En 1504, sous le roi Henri VII, il accéda pour la première fois au parlement. Henri VIII renouvela son mandat en 1510 et il l’établit également représentant de la Couronne dans la capitale, lui ouvrant une carrière remarquable dans l’administration publique. Dans la décennie qui suivit, le roi l’envoya à diverses reprises, pour des missions diplomatiques et commerciales, dans les Flandres et dans le territoire de la France actuelle. Nommé membre du Conseil de la Couronne, juge président d’un tribunal important, vice-trésorier et chevalier, il devint en 1523 porte-parole, c’est-à-dire président, de la Chambre des Communes.

Universellement estimé pour son indéfectible intégrité morale, pour la finesse de son intelligence, pour son caractère ouvert et enjoué, pour son érudition extraordinaire, en 1529, à une époque de crise politique et économique dans le pays, il fut nommé par le roi Chancelier du Royaume. Premier laïc à occuper cette charge, Thomas fit face à une période extrêmement difficile, s’efforçant de servir le roi et le pays. Fidèle à ses principes, il s’employa à promouvoir la justice et à endiguer l’influence délétère de ceux qui poursuivaient leur propre intérêt au détriment des plus faibles. En 1532, ne voulant pas donner son appui au projet d’Henri VIII qui voulait prendre le contrôle de l’Église en Angleterre, il présenta sa démission. Il se retira de la vie publique, acceptant de supporter avec sa famille la pauvreté et l’abandon de beaucoup de personnes qui, dans l’épreuve, se révélèrent de faux amis.

Constatant la fermeté inébranlable avec laquelle il refusait tout compromis avec sa conscience, le roi le fit emprisonner en 1534 dans la Tour de Londres, où il fut soumis à diverses formes de pression psychologique. Thomas More ne se laissa pas impressionner et refusa de prêter le serment qu’on lui demandait parce qu’il comportait l’acceptation d’une plate-forme politique et ecclésiastique qui préparait le terrain à un despotisme sans contrôle. Au cours du procès intenté contre lui, il prononça une apologie passionnée de ses convictions sur l’indissolubilité du mariage, le respect du patrimoine juridique inspiré par les valeurs chrétiennes, la liberté de l’Église face à l’État. Condamné par le Tribunal, il fut décapité.
Au cours des siècles qui suivirent, la discrimination à l’égard de l’Église s’atténua. En 1850, la hiérarchie catholique fut rétablie en Angleterre. Il fut alors possible d’engager les causes de canonisation de nombreux martyrs. Thomas More fut béatifié par le Pape Léon XIII en 1886, en même temps que cinquante-trois autres martyrs, dont l’évêque John Fischer. Avec ce dernier, il fut canonisé par Pie XI en 1935, à l’occasion du quatrième centenaire de son martyre.

4. De nombreuses raisons militent en faveur de la proclamation de saint Thomas More comme Patron des Responsables de gouvernement et des hommes politiques. Entre autres, le besoin ressenti par le monde politique et administratif d’avoir des modèles crédibles qui indiquent le chemin de la vérité en une période historique où se multiplient de lourds défis et de graves responsabilités. Aujourd’hui, en effet, des phénomènes économiques fortement innovateurs sont en train de modifier les structures sociales ; d’autre part, les conquêtes scientifiques dans le secteur des biotechnologies renforcent la nécessité de défendre la vie humaine sous toutes ses formes, tandis que les promesses d’une société nouvelle, proposées avec succès à une opinion publique déconcertée, requièrent d’urgence des choix politiques clairs en faveur de la famille, des jeunes, des personnes âgées et des marginaux.
Dans ce contexte, il est bon de revenir à l’exemple de saint Thomas More, qui se distingua par sa constante fidélité à l’autorité et aux institutions légitimes, précisément parce qu’il entendait servir en elles non le pouvoir mais l’idéal suprême de la justice. Sa vie nous enseigne que le gouvernement est avant tout un exercice de vertus. Fort de cette rigoureuse assise morale, cet homme d’État anglais mit son activité publique au service de la personne, surtout quand elle est faible ou pauvre ; il géra les controverses sociales avec un grand sens de l’équité ; il protégea la famille et la défendit avec une détermination inlassable ; il promut l’éducation intégrale de la jeunesse. Son profond détachement des honneurs et des richesses, son humilité sereine et joviale, sa connaissance équilibrée de la nature humaine et de la vanité du succès, sa sûreté de jugement enracinée dans la foi, lui donnèrent la force intérieure pleine de confiance qui le soutint dans l’adversité et face à la mort. Sa sainteté resplendit dans le martyre, mais elle fut préparée par une vie entière de travail dans le dévouement à Dieu et au prochain.

Mentionnant des exemples semblables de parfaite harmonie entre la foi et les œuvres, j’ai écrit dans l’exhortation apostolique post-synodale Christifideles laici que « l’unité de la vie des fidèles laïcs est d’une importance extrême : ils doivent en effet se sanctifier dans la vie ordinaire, professionnelle et sociale. Afin qu’ils puissent répondre à leur vocation, les fidèles laïcs doivent donc considérer les activités de la vie quotidienne comme une occasion d’union à Dieu et d’accomplissement de sa volonté, comme aussi de service envers les autres hommes » (n. 17).
Cette harmonie entre le naturel et le surnaturel est l’élément qui décrit peut-être plus que tout autre la personnalité du grand homme d’État anglais : il vécut son intense vie publique avec une humilité toute simple, marquée par son humour bien connu, même aux portes de la mort.

Tel est le but où le conduisit sa passion pour la vérité. On ne peut séparer l’homme de Dieu, ni la politique de la morale ; telle est la lumière qui éclaira sa conscience. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, « l’homme est une créature de Dieu, et c’est pourquoi les droits de l’homme ont en Dieu leur origine, ils reposent dans le dessein de la création et ils entrent dans le plan de la rédemption. On pourrait presque dire, d’une façon audacieuse, que les droits de l’homme sont aussi les droits de Dieu » (Discours du 7 avril 1998 aux participants à la Rencontre universitaire internationale UNIV’98).

Et c’est précisément dans la défense des droits de la conscience que l’exemple de Thomas More brilla d’une lumière intense. On peut dire qu’il vécut d’une manière singulière la valeur d’une conscience morale qui est « témoignage de Dieu lui-même, dont la voix et le jugement pénètrent l’intime de l’homme jusqu’aux racines de son âme » (Encyclique Veritatis splendor, n. 58), même si, en ce qui concerne l’action contre les hérétiques, il fut tributaire des limites de la culture de son temps.
Le Concile œcuménique Vatican II, dans la constitution Gaudium et spes, remarque que, dans le monde contemporain, grandit « la conscience de l’éminente dignité qui revient à la personne humaine, du fait qu’elle l’emporte sur toute chose et que ses droits et devoirs sont universels et inviolables » (n. 26). L’histoire de saint Thomas More illustre clairement une vérité fondamentale de l’éthique politique. En effet, la défense de la liberté de l’Église contre des ingérences indues de l’État est en même temps défense, au nom de la primauté de la conscience, de la liberté de la personne par rapport au pouvoir politique. C’est là le principe fondamental de tout ordre civil, conforme à la nature de l’homme.

5 Je suis donc certain que l’élévation de l’éminente figure de saint Thomas More au rang de Patron des Responsables de gouvernement et des hommes politiques pourvoira au bien de la société. C’est là d’ailleurs une initiative qui est en pleine syntonie avec l’esprit du grand Jubilé, qui conduit au troisième millénaire chrétien.
En conséquence, après mûre considération, accueillant volontiers les demandes qui m’ont été adressées, j’établis et je déclare Patron céleste des Responsables de gouvernement et des hommes politiques saint Thomas More, et je décide que doivent lui être attribués tous les honneurs et les privilèges liturgiques qui reviennent, selon le droit, aux Patrons de catégories de personnes.
Béni et glorifié soit Jésus Christ, Rédempteur de l’homme, hier, aujourd’hui, à jamais.

Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 31 octobre 2000, en la vingt-troisième année de mon Pontificat.

IOANNES PAULUS PP. II

VÉRA BABOUN, la mairesse de Bethléem : « Le problème palestinien est un problème mondial »

Article paru dans Week-End | 24 juillet, 2016 - 19:00 (extraits)

« L’instruction des filles n’est pas considérée comme importante dans beaucoup de pays arabes…

— En Palestine, elle est considérée comme étant un élément fondamental pour le pays et ses habitants. J’ai enseigné les sciences au niveau universitaire pendant plus de vingt ans et plus de 70% de mes élèves étaient de jeunes femmes. De manière générale, le taux d’alphabétisation en Palestine est élevé. Les Palestiniens doivent faire face au quotidien, à une série de défis qui remontent dans le temps. Nous avons été éparpillés aux quatre coins du monde et avons développé une capacité de résistance et de résilience pour continuer à exister. L’instruction est une arme de cette bataille pour la survie. Comme vous le savez, les Palestiniens vivent dans un pays qui est entouré, occupé, morcelé, colonisé, en certains endroits, par Israël, et cela affecte profondément leur façon de vivre au quotidien. En raison de cette occupation, nous avons créé une manière de vivre particulière dans laquelle l’instruction a un rôle de premier plan. Nos enfants doivent étudier pour pouvoir faire face à la situation dans laquelle ils sont contraints de vivre : celle d’un pays occupé. En sus de cela, la manière dont l’occupation israélienne de la Palestine est faite empêche la libre circulation des Palestiniens, ce qui fait que nos enfants diplômés, dont les femmes, ne trouvent pas de travail. En raison de ces contraintes, les jeunes ne trouvent pas de travail à Bethléem où le taux de chômage des jeunes, qui sont âgés de moins de 29 ans, est de 27 %. Pour aller travailler à Ramallah, la capitale, les gens qui habitent Bethléem doivent faire quotidiennement quatre heures de routes coupées par des barrages militaires. Pour aller travailler, il faut traverser la frontière. Il est parfois nécessaire de déménager pour pouvoir travailler. Ce sont là quelques-unes des conditions de vie d’une jeune femme palestinienne. C’est également le cas des jeunes Palestiniens.

Les conditions de vie ne sont donc pas propices au développement professionnel des jeunes Palestiniens.

— Comment voulez-vous que les jeunes Palestiniens, qui doivent faire face à toutes sortes de restrictions, puissent se développer et s’épanouir professionnellement ? Ces conditions de vie pénibles — et qui seraient inacceptables ailleurs — existent parce qu’une grande partie du territoire de la Palestine est occupée illégalement par Israël. Comment voulez-vous vous développer professionnellement si vos capacités de circuler, de vous déplacer librement sont restreintes. Mais ces restrictions ne touchent pas que les jeunes diplômés d’université, elles affectent tous les Palestiniens, y compris les Palestiniennes qui n’ont pas fait des études poussées. C’est le cas des femmes qui vivent dans les régions rurales, dans les villages. J’aimerais ajouter que l’alphabétisation ne consiste pas seulement à savoir lire, écrire et compter. Elle consiste aussi à savoir comment affronter la vie, comme ces Palestiniennes qui ne sont pas allées à l’université, mais qui savent, en l’absence des hommes emprisonnés, continuer à faire marcher leur petite exploitation et aller vendre leurs produits au marché pour pouvoir faire vivre la famille. La Palestinienne sait résister et se battre pour survivre.

Donc, pour un Palestinien, la résistance est un élément de son quotidien ?

— Oui, parce qu’il est attaqué, agressé quotidiennement dans tous les aspects de sa vie. L’instruction est aussi pour nous un mode de résistance non violente contre l’occupation de notre pays et tout ce qui l’accompagne. Elle est une arme de notre combat pour défendre notre identité et survivre. Permettez-moi de vous donner un exemple concret de cette occupation. Je suis la mairesse de Bethléem qui, comme vous le savez est une ville historique à plus d’un titre et pour plusieurs religions. La principale industrie de Bethléem est le tourisme historique et religieux dans ce qui est le berceau du christianisme, sans oublier les mosquées, parce que Bethléem est une ville arabo-chrétienne. 66% de la ville sont sous le contrôle des Israéliens qui considèrent 49% de cet espace comme une zone militaire. Avec ce qui reste, nous ne pouvons pas avoir des projets de développement et nous devons également faire face à un manque d’eau chronique que nous devons acheter aux Israéliens. Nous avons besoin de 15 000 m3 par jour, alors qu’ils ne nous en fournissent que 11 000 m3 d’une eau puisée dans les rivières et les nappes phréatiques palestiniennes ! Savez-vous ce qui est pire dans cette situation ? C’est de savoir que dans certains villages palestiniens, les enfants n’ont pas d’eau pour boire, alors qu’à deux cents mètres plus loin, dans une des nombreuses colonies juives, les piscines débordent !
Ce n’est pas possible !

— C’est une situation que l’on vit dans toute la Palestine, plus particulièrement dans les régions occupées, c’est-à-dire les régions occupées illégalement par Israël depuis 1967. Depuis les accords d’Oslo signés en 1993, Israël est supposé retourner ces territoires à la Palestine et rien n’a été fait en dépit des votes aux Nations unies condamnant Israël. Depuis 23 ans, au lieu de rendre les territoires aux Palestiniens, Israël a, au contraire, créé des colonies dans ces territoires pour ses ressortissants. C’est ainsi que plus d’un demi-million de juifs sont aujourd’hui installés dans ces territoires qui appartiennent à la Palestine. Mais permettez-moi de revenir à Bethléem dont le développement est bloqué par Israël. Notre tourisme est bloqué puisque pour venir à Bethléem il faut passer par Israël. Pour organiser le voyage, il faut passer par des agences de voyages contrôlées par les Israéliens. Elles font en sorte que les visiteurs ne passent que quelques heures à Bethléem pour que ces derniers passent plus de jours à Jérusalem, dans les infrastructures israéliennes. Tout est fait pour encercler, étouffer la Palestine et ses habitants. Savez-vous, par exemple, qu’en raison du mur construit par les Israéliens, on ne peut pas circuler librement à l’intérieur et à l’extérieur de Bethléem sans un permis délivré par les Israéliens ? Savez-vous encore que moi, en tant que mairesse de Bethléem, je dois demander un permis des autorités israéliennes pour me rendre à Jérusalem, alors que nous sommes des villes sœurs !

Est-ce qu’il existe une solution à ce problème entre Israël et la Palestine qui date de plus de quarante ans ?

— Plusieurs tentatives de paix ont échoué en raison de l’attitude d’Israël. L’accord d’Oslo de 2003, qui prévoyait le retour à la Palestine des territoires occupés, n’a jamais été appliqué. Notre espoir aujourd’hui réside dans ce que l’on appelle l’initiative française, un plan qui concerne la situation au Moyen-Orient, en Palestine et en Afrique. Notre espoir, c’est de convaincre les pays du monde de soutenir ce plan pour qu’enfin, comme Israël, la Palestine soit reconnue comme un état de droit par les Nations unies. C’est en Palestine que sont nées les trois grandes religions : le judaïsme, le christianisme et l’islam et où les Palestiniens continuent à vivre en état de guerre.

En quoi consiste le travail de la mairesse de Bethléem ?

— La ville de Bethléem qui fait partie de la région/province du même nom compte huit conseils municipaux et vingt conseils de villages. La ville que je dirige est d’une superficie de 7,3 kilomètres carrés et compte 41 000 habitants. Mon travail consiste à administrer les départements et services de la ville, mais je préside aussi les services de distribution d’eau, d’électricité et de gestion de tout-à-l’égout de la région. J’ai aussi un rôle et des pouvoirs au niveau régional. Sur notre territoire se trouve également le mur édifié par Israël qui sépare Bethléem de Jérusalem, et face à mon bureau se dresse la basilique catholique de la Nativité.

Pour une catholique, cela doit être un bonheur spirituel d’avoir son bureau face à l’un des lieux sacrés du catholicisme !

— Exactement. Je suis la première femme — et la première catholique — à occuper cette fonction et j’ai le bonheur de commencer toutes mes journées de travail en regardant la basilique de la Nativité. Je crois que cette proximité avec un des lieux saints du catholicisme me donne une énergie particulière et m’aide à mieux faire mon travail.

Quelles sont les relations entre la mairesse palestinienne de Bethléem et les autorités de l’État d’Israël ?

— Elles n’existent pas. Les Israéliens ont construit un mur autour de Bethléem pour la séparer de Jérusalem qui bloque nos activités et nos plans de développement. On ne peut pas développer une ville enclavée avec des zones contrôlées par les Israéliens qui sont sur notre territoire, mais ne dépendent pas de notre juridiction. Comment pouvez-vous avoir des liens avec des gens qui vous oppressent ?

Comment voyez-vous l’avenir de la Palestine et d’Israël ?

— Aussi longtemps que les conditions menant à la paix ne seront pas prises au sérieux, le futur n’est pas prévisible au Moyen-Orient. Les Palestiniens vivent aujourd’hui à l’intérieur des frontières imposées, dans un climat de tension de plus en plus intolérable. Les Palestiniens ne vivent pas dans les mêmes conditions de liberté, d’équité et de sécurité que le reste des habitants de la planète. Nous ne comprenons pas comment la communauté internationale peut accepter cette situation. Nous ne comprenons pas pourquoi cette communauté internationale n’arrive pas à faire respecter et mettre en pratiques des résolutions et des accords signés devant ses instances sérieuses. Israël signe des accords, mais ne les met pas en pratique. Son objectif est de gagner du temps pour édifier des colonies dans les territoires occupés afin de rendre impossible toute négociation. Les choses sont en train de s’aggraver, notre territoire diminue, des murs et des colonies sont construits pour mettre en péril l’état palestinien. Ils pensent sans doute qu’avec le temps les barrages physiques qu’ils ont construits seront intériorisés, mais comme je vous l’ai dit déjà dit, avec toutes ces années d’occupation, le Palestinien a développé une énorme capacité de résistance et de résilience. Je pense que le problème palestinien est aujourd’hui le problème de la communauté internationale. Comment peut-elle accepter qu’au 21e siècle un pays puisse être encore occupé et ses habitants vivre enfermés dans des frontières illégales ? Il faut que la communauté internationale prenne position, se fasse entendre pour que la Palestine que l’on surnomme aussi la Terre sainte, où sont nées le christianisme, le judaïsme et l’Islam, vive enfin en paix !
Ne serait-il pas nécessaire que les Palestiniens et les Israëliens entament des négociations directes ?

— Cela a été tenté dans le passé sans résultats. A quoi cela sert de tomber d’accord si une des parties ne met pas en pratique les termes de l’accord qu’elle a pourtant ratifié ? C’est pour cette raison que nous voulons que les discussions se déroulent en présence de la communauté internationale, avec sa collaboration. Il faut vous dire que la paix n’est pas bonne seulement pour la Palestine, elle l’est également pour Israël et pour le monde entier. La paix ne peut pas exister dans le monde si elle n’existe pas en Palestine.

Avec les juifs ?

— Il n’y a pas de juifs à Bethléem. Il n’y a que des Palestiniens de foi arabe ou chrétienne. Les juifs vivent dans les colonies que l’État d’Israël a implantées sur nos territoires occupés. Pour des raisons évidentes, les juifs et les Palestiniens ne se fréquentent pas à Bethléem. Je découvre à Maurice comment des hommes et des femmes ayant des croyances différentes peuvent vivre et cohabiter en toute sérénité. Ce que nous voulons faire en Palestine. »

Sites à consulter

Sainte Anne

le Mauricien Vera Baboun