La cathédrale Notre-Dame de Chartres, construite sur un promontoire dominant l’uniforme et monotone plateau de Beauce, admirablement chantée par le poète Charles Péguy, est le fruit sublime d’une longue histoire, puisant ses racines aux temps druidiques. La tradition ou la légende rapporte en effet que les druides, en leur sanctuaire carnute de Chartres, rendaient un culte à la « Virgo paritura », la « Vierge qui doit enfanter ». Culte prophétique, rendu en écho lointain à la prophétie d’Isaïe dans l’Ancien Testament, légende ou mythe fondateur ? La question a divisé les historiens et ne peut être définitivement tranchée. Nulle preuve n’est venue appuyer l’une ou l’autre hypothèse. Les spécialistes et hommes d’Eglise penchent aujourd’hui pour la thèse du mythe fondateur, mais tel n’était pas le cas de nombre de leurs glorieux prédécesseurs, notamment Gerson, le roi Charles VII, le pape Léon X, qui, dans une bulle de 1517, rappelait que Marie fut vénérée à Chartres avant même l’Incarnation du Christ, ou encore M^gr Pie au XIX^ème siècle, grand acteur du renouveau de Chartres après la tourmente révolutionnaire.

Quoi qu’il en soit, légende ou réalité, cette donnée fait corps avec l’histoire de la cathédrale de Chartres, implantée sur un lieu majeur de culte druidique en Gaule, tout comme l’est la fondation de Rome par Romulus et Remus. On trouve d’ailleurs un écho tout proche, à Longpont (Essonne), où l’on rapporte que, dans les temps druidiques, on y vénérait également une « Virgo paritura », une Vierge devant enfanter.

C’est sur ce promontoire, qui permet aux pèlerins d’apercevoir les flèches de Notre-Dame de Chartres quelque vingt kilomètres avant le but, que furent successivement bâtis plusieurs sanctuaires dédiés à Marie. Le dramatique incendie de la cathédrale à peine reconstruite par l’évêque Fulbert en , est à l’origine de la reconstruction de la si sublime cathédrale que l’on peut maintenant admirer. Reconstruite en ans par les efforts, la volonté et les sacrifices de toute une cité, Notre-Dame de Chartres, inscrite par l’UNESCO en 1979 au patrimoine mondial de l’humanité, a été, avec bonheur, qualifiée d’archétype de la cathédrale gothique », cet art dit « gothique » et qui, loin d’être barbare, est un des sommets de l’art architectural français, au point, par exemple, que certains, comme le souligne M^gr Pansard, évêque de Chartres, ont pu mettre en parallèle avec le Parthénon lui-même.

Richesse, variété, vigueur aussi de la statuaire de Chartres : ici les pierres semblent animées, les regards des saints et des prophètes resplendissent d’une lumière qui fait écho à celle diffusée par les vitraux.

Notre-Dame de Chartres possède en effet le plus vaste et le plus bel ensemble de vitraux médiévaux, qui soit au monde, par son homogénéité, ses qualités de couleur (dont le fameux « bleu de Chartres »), son iconographie de l’Ancien et du Nouveau Testament qui en est la prolongation, la Révélation et l’Aboutissement. Cet ensemble sublime de vitraux constitue un hymne à la Vie et à la Lumière, à la Vierge Marie et à Son divin fils, Jésus-Christ. Rois de l’Ancien Testament, Rois Très chrétiens du Royaume de France, Fils aînés de l’Eglise, mais aussi chevaliers, artisans et paysans, toutes corporations confondues, y rendent hommage au Roi de l’Univers et à la Très sainte Vierge Marie, couronnée par son divin Fils. En ces Lieux sacrés, l’Image se fait Message, la Lumière est Signe, la Pierre sculptée devient Parole et la Mort elle-même, par le Christ, est vaincue. En cette cathédrale Notre-Dame, dédiée à la Vierge Marie, à son Assomption et son Couronnement céleste, il n’est point de tombeau et la corruption de la mort n’a pas sa place. Tout incite et conduit au recueillement, au silence, à la méditation et à la prière. Le vitrail des pèlerins dans le haut chœur vient rappeler, s’il en était besoin, que la cathédrale Notre-Dame de Chartres est un haut-lieu de pèlerinages.

Pèlerinages des Rois de France, qui, nombreux, se rendirent à Chartres, notamment : Charlemagne, défenseur de la foi, Charles le Chauve, petit-fils de Charlemagne, qui, en 876, fit offrande au sanctuaire du Voile de la Sainte Vierge Marie, Philippe Auguste, qui devait sa naissance à Marie, Saint Louis- qui fit un pèlerinage à pieds nus, de Nogent-le-Roi à Chartres- et sa mère Blanche de Castille, qui offrirent à la cathédrale les admirables vitraux de la rose nord du transept , Henri III, si assidu à Chartres, et Louis XIV, qui se rendit à Chartres pour placer son règne sous la protection de Marie. Citons bien sur aussi Henri IV, seul roi à s’être fait sacrer à Chartres, pour des raisons touchant à l’histoire tourmentée de son temps.

Pèlerinages du peuple chrétien, de l’époque médiévale à ceux du XIX^e siècle, siècle de renouveau de la foi, des pèlerinages de Charles Péguy à ceux du temps présent : leur histoire mériterait bien des développements ! Charles Péguy, dont les poèmes admirables sont devenus indissociables de toute évocation de Notre-Dame de Chartres et constituent eux aussi un hymne à la Vierge Marie ; les pèlerinages d’aujourd’hui, avec le pèlerinage Notre-Dame de Chrétienté, qui a pris une place majeure parmi les grands pèlerinages de France ; pèlerinage des étudiants, pèlerinage des Tamouls, pèlerinages scouts, témoignent eux aussi de la diversité, de la jeunesse, de la force et de la prégnance de la foi en Marie, notre Mère et Reine de France pour l’éternité.