Pèlerinage gitan des Saintes Maries de la Mer
Du 24 au 25 mai 2017
Du 24 au 25 mai 2017
« Par quel mystère ces deux Saintes se trouvent-elles sur le rivage méditerranéen ?
Le Bréviaire du Diocèse d’Aix en Provence nous renseigne :
« Chassés par la persécution de Palestine, de nombreux disciples du Christ ont été exilés et ont porté la Foi chrétienne dans notre région. »
Avec Marie-Madeleine, Lazare, Maximin et beaucoup d’autres, Marie-Jacobé et Marie-Salomé furent donc arrêtées et embarquées sur un navire, puis, à proximité des côtes, abandonnées sur un rafiot sans voile ni rames. Guidées par la Providence elles abordèrent le rivage provençal.
Et tandis que les disciples partaient évangéliser au loin, les Saintes Maries Jacobé et Salomé, femmes d’âge puisque mères d’Apôtres, demeuraient sur ce rivage qui porte désormais leur nom. Elles auraient évangélisé les gens du pays et les Romains qui occupaient la région. »
« L’Eglise des Saintes Maries de la Mer connaît plusieurs fois par an des heures de ferveur intense à l’occasion des Pèlerinages. Roms, Manouches, Tsiganes et Gitans arrivent des quatre coins d’Europe et même d’autres continents pour vénérer leur Sainte, Sara la Noire. Ils s’installent dans les rues, sur les places, au bord de la mer. Pendant huit à dix jours, ils sont ici chez eux.
Le pèlerinage est aussi l’occasion de retrouvailles et la plupart des enfants sont baptisés dans l’église des Saintes. »
- Les 24 et 25 Mai (Procession à la mer de Sara le 24, Procession des Saintes Maries Jacobé et Salomé le 25).
- Le Dimanche le plus proche du 22 Octobre (Procession à la mer des Saintes Maries Jacobé et Salomé).
Ces fêtes remontent au Moyen Age et leur cérémonial est toujours le même, la foule, cierges en main, chante et acclame chaque année les Saintes Maries.
- Le 24 Mai
On mène en Procession à la mer, Sara, la Patronne des Gitans. Avant cette manifestation, à l’intérieur de l’Eglise, les Châsses contenant les reliques, ont été lentement descendues de la « Chapelle Haute » au moyen d’un treuil au milieu des chants et des acclamations. La statue de Sara, portée par les Gitans, jusqu’à la mer, symbolise l’attente et l’accueil des Saintes Maries Jacobé et Salomé.
Le cortège de ce jour, en l’honneur de Sara et des Gitans, est d’institution récente. En 1935, le Marquis de Baroncelli et quelques Gardians de Camargue, soucieux de donner aux Gitans dans le Pèlerinage une place qu’ils n’avaient pas (ils n’étaient encore à cette époque que quelques centaines, perdus dans la grande foule des pèlerins de Provence et du Languedoc), obtinrent d’organiser avec les Gitans de la région cette marche vers la mer en souvenir de l’arrivée de « leur Sainte ».
- Le 25 Mai
Après la messe solennelle du matin, la « barque », avec à bord les statues des deux Maries, est portée à la mer, accompagnée par la foule de pèlerins Gitans et non-Gitans, par les Gardians à cheval et les Arlésiennes en costume. Les porteurs avancent en mer, pour bien symboliser l’arrivée des Saintes Maries Jacobé, Salomé et de la Foi, par la mer. L’Evêque, à bord d’une barque traditionnelle de pêcheurs, bénit la mer, le pays, les pèlerins et les Gitans. La Procession revient alors vers l’Eglise dans la joie et les acclamations, accompagnée des instruments de musique et du carillon des cloches. L’après-midi, dans la prière et la ferveur populaire, se déroule à l’Eglise la cérémonie de la remontée des Châsses à la « Chapelle Haute ».
Durant les deux jours, offices et veillées se succèdent dans l’Eglise. »
« La statue de Sara, Patronne des Gitans, se trouve dans l’Eglise des Saintes Maries de la Mer, à droite au fond de la crypte, revêtue de robes multicolores et de bijoux. L’autel central supporte un reliquaire, et contre le mur se trouve la croix de Procession, portée par les Gitans. Il faut voir cette crypte au moment du Pèlerinage de Mai, envahie par la foule des Gitans, illuminée de mille cierges que la chaleur recourbe comme des serpents.
Connue dans le monde entier comme la « Patronne » des Gitans, Sara pose à l’historiographe une énigme que ne semble pas prête d’être résolue. Une tradition camarguaise y voit la servante des Saintes Maries Jacobé et Salomé en Palestine, et leur compagne sur les bords du Rhône. Une autre tradition, attribuée aux Gitans, y voit une Gitane qui fut installée sur les rives provençales et qui, la première, accueillit ici même les exilés de Terre Sainte. Mais quel fondement à cette tradition quand l’Histoire ne mentionne la venue des gitans en France et en Provence qu’à partir du XVe siècle ?
Si d’autres versions ont été également proposées, en vérité, nul ne sait qui est Sara, ni comment son culte s’instaura aux Saintes Maries de la Mer, où l’on venait la prier de très loin bien avant la Révolution. Pour les Gitans, qui se reconnurent en elle et l’adoptèrent comme protectrice attitrée, elle est « Sara-la-Kâli », un mot tsigane qui signifie à la fois « gitane » et « noire ».
La première mention de Sara se trouve dans un texte de Vincent Philippon rédigé vers 1521 : « La Légende des Saintes Maries » et dont le manuscrit est à la bibliothèque d’Arles (13). On l’y voit quêtant à travers la Camargue pour subvenir aux besoins de la petite communauté chrétienne. Cette pratique de la « chine » aurait pu, pensent certains auteurs, la faire assimiler par la suite à une Gitane.
Les Gitans, eux, ne se posent pas tant de questions. Et ils suivent par milliers, l’étonnante Procession qui, le 24 Mai, après la descente des Châsses, conduit « leur Patronne » de l’Eglise à la mer ; étrange cohorte en vérité, peuple en marche, cohue débordant des rues étroites que les Gardians à cheval ont du mal à canaliser, houle de têtes et de visages au-dessus de laquelle oscille la frêle statue portée à bras d’hommes. Les Arlésiennes lui font bien aussi une escorte d’honneur ; mais ce sont les Gitans qui lancent inlassablement, sur des kilomètres, cantiques et cris, mille fois répétés : « Vive Sainte Sara ». Folklore si l’on veut, mais folklore inoubliable. On a trop dit de Sara qu’elle avait des allures d’idole Païenne. C’est oublier que cette foule, à sa manière, prie. Ce n’est pas vouloir comprendre que ce peuple derrière elle, en marchant vers la mer, marche aussi vers Dieu. »
« C’est en ces termes que le Pape Paul VI accueillit, en 1965, les Gitans venus de toute l’Europe et au milieu desquels il voulut célébrer son 68e anniversaire.
Nul vocable ne saurait mieux leur convenir. Déjà quand, à l’aube du XVe siècle, leurs ancêtres arrivèrent en France, ils se présentèrent comme des pénitents, condamnés à errer de par le monde en expiation de leurs péchés. Ils montraient, à l’appui de leur dire, des lettres du Pape Martin V. Pendant tout le Moyen Age, ils demeurèrent fidèles au célèbre Pèlerinage de Saint Jacques de Compostelle.
De nos jours, plus que jamais, le Pèlerinage, si bien adapté à leur nomadisme inné, reste l’acte religieux essentiel des Gitans. Le mauvais accueil qui leur est parfois réservé dans d’autres églises, où ils se sentent étrangers, les incite davantage encore à se retrouver entre voyageurs pour prier à leur manière et accomplir quelques vœux. Est-il dans la détresse, a-t-il un des siens malades, le Gitan fait un vœu à un Saint. Si c’est le Pèlerinage des Saintes Maries de la Mer, il s’engage à l’accomplir dans de pénibles conditions de pénitence.
Qui n’a pas assisté aux veillées gitanes dans la vieille Eglise forteresse embrasée de cierges, ne saura jamais rien de la vraie ferveur gitane. La foule arrive, certains soirs, précédée par les violons et les guitares. On allume une multitude de petits cierges que chacun tient élevés vers la nef. On prie très fort, on clame des invocations, on présente les enfants à bout de bras devant les statues… Le Pèlerinage de mai permet d’intensifier, pendant plusieurs jours, l’évangélisation des enfants et des familles par les points d’aumônerie, et des conversions intérieures se réalisent dans le secret des cœurs. De nombreux Gitans profitent aussi de ce rassemblement familial pour faire baptiser leurs enfants, dans l’Eglise des Saintes Maries de la Mer.
Si le temps n’est plus quand les Gitans, venus par train ou parfois à pied, passaient la nuit dans la crypte de Sara, c’est toujours pour « leur Patronne » qu’ils viennent dans l’antique sanctuaire camarguais. Certes, Marie-Jacobé et Marie-Salomé tiennent aussi une place dans leurs cœurs. Ils les acclament lors de la descente des Châsses et ne manquent pas de hisser jusqu’à leurs statues les enfants qui posent sur elles leurs mains et leurs lèvres. Mais c’est Sara qui est « leur Sainte à eux ». Chacun ajoute un cierge à la blanche forêt ardente qui répand dans la crypte une chaleur d’étuve. On glisse, dans la boîte réservée aux intentions, des linges d’enfants, d’humbles bijoux, de naïfs messages. Et puis Sara est habillée de neuf. Quarante, cinquante manteaux s’amoncellent sur la frêle statue qui grossit de jour en jour, et dont le fin visage pâlit sous les attouchements implorants et fervents. »
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